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  • Jour de deuil : La CCPD reconnaît les personnes qui ont perdu la vie ou qui ont souffert d’une blessure ou d’une maladie à cause d’une tragédie liée au travail

    Jour de deuil : La CCPD reconnaît les personnes qui ont perdu la vie ou qui ont souffert d’une blessure ou d’une maladie à cause d’une tragédie liée au travail

    28 avril 2022 : c’est aujourd’hui le Jour de deuil national pour les travailleurs qui sont morts ou blessés en milieu de travail. Le directeur général de la CCPD, Donald MacPherson, a participé à une cérémonie commémorative à Vancouver, en Colombie-Britannique, pour rendre hommage à ceux qui ont perdu la vie ou qui ont souffert de blessures ou de maladies à cause d’une tragédie liée au travail.

    Le Jour de deuil est un rappel brutal du besoin urgent d’un approvisionnement sûr en drogues en Colombie-Britannique et à travers le Canada, ainsi que de la nécessité de faciliter l’accès aux mesures de réduction des méfaits sur le marché du travail.

    A memorial wreath is placed at a ceremony in Vancouver, B.C. on April 28, 2022, honouring workers killed or injured on the job.
    A memorial wreath is placed at a ceremony in Vancouver, B.C. on April 28, 2022, honouring workers killed or injured on the job.

    En Colombie-Britannique, la plupart des personnes employées qui sont mortes par empoisonnement aux drogues toxiques entre 2017 et 2021 travaillaient dans les secteurs des métiers, du transport et de la conduite d’équipement.

    L’impact de la crise des empoisonnements par la drogue sur les personnes travaillant dans les secteurs des métiers, de la construction et des transports peut être dû à des facteurs tels que la gestion de la douleur physique, la santé mentale et une culture de consommation de substances dans ce secteur. 1

    Selon le rapport de 2022 du comité de révision du Service des coroners de la Colombie-Britannique intitulé BC Coroners Service Death Review Panel : A Review of Illicit Drug Toxicity Deaths (en anglais), 35 % de ceux qui sont décédés à cause des drogues toxiques entre août 2017 et juillet 2021 avaient un emploi au moment de leur décès et plus de la moitié (52 %) d’entre eux travaillaient dans les métiers, le transport ou la conduite d’équipement. 2

    En ce Jour de deuil national pour les travailleurs décédés ou blessés en milieu de travail, la Coalition canadienne des politiques sur les drogues lance à nouveau un appel pour une action immédiate et vigoureuse pour mettre en place des alternatives d’approvisionnement sûres sur le marché des drogues illégales toxiques, ainsi qu’une action du gouvernement fédéral pour décriminaliser la simple possession de drogues au Canada afin de réduire la stigmatisation et d’impliquer les travailleurs qui risquent de mourir à cause de la toxicité des drogues.

    Pour mieux expliquer pourquoi ces travailleurs sont particulièrement touchés, la Trousse d’outils intitulée L’usage de substances et le milieu de travail : Ressource pour les employeurs et les employés dans les métiers spécialisés publiée par le Centre canadien sur les dépendances et l’usage de substances, déclare : 

    « Il n’est pas rare que ces travailleurs souffrent de blessures, de douleur et de stress en lien avec le travail. Et ils ne savent pas toujours où obtenir les ressources nécessaires. Ce qui pourrait entraîner un usage plus fréquent d’analgésiques et d’autres substances pour se sentir mieux » .3

    En janvier 2022, la province a annoncé un nouveau financement pour la Vancouver Island Construction Association (VICA) pour étendre son projet Tailgate Toolkit (en anglais), un programme de réduction des méfaits et de prévention des empoisonnements par drogues toxiques dans l’industrie de la construction de la Colombie-Britannique. Selon la province, ce projet contribuera à sensibiliser les gens à la gestion de la douleur et à réduire la stigmatisation associée à la consommation de drogues.4

    A group of workers attend a memorial ceremony in Vancouver, B.C. on April 28, 2022, to honour those who have died or suffered injury or illness due to work-related tragedies.
    c’est aujourd’hui le Jour de deuil national pour les travailleurs qui sont morts ou blessés en milieu de travail.
    A group of workers attend a memorial ceremony in Vancouver, B.C. on April 28, 2022.

    Références:

    1. https://thetailgatetoolkit.ca/wp-content/uploads/2022/03/Kelowna-five-fold-metropol.pdf
    2. https://www2.gov.bc.ca/assets/gov/birth-adoption-death-marriage-and-divorce/deaths/coroners-service/death-review-panel/review_of_illicit_drug_toxicity_deaths_2022.pdf
    3. https://www.ccsa.ca/sites/default/files/2022-02/CCSA-Substance-Use-Workplace-Employers-Employees-Trades-Toolkit-2021-en.pdf
    4. https://news.gov.bc.ca/releases/2022MMHA0003-000044
  • Letter to Ministers Bennett and Duclos Re : Un seuil cumulatif proposé de 4,5 grammes en Colombie-Britannique

    Letter to Ministers Bennett and Duclos Re : Un seuil cumulatif proposé de 4,5 grammes en Colombie-Britannique

    Le 13 avril 2022

    Madame Carolyn Bennett, MD, CP, MP.

    Ministre de la Santé mentale et des Dépendances et ministre associée de la Santé

    Monsieur Jean-Yves Duclos

    Ministre de la Santé

    c. c. Madame Sheila Malcolmson, ministre de la Santé mentale et des Dépendances de la Colombie-Britannique

    Madame la Ministre Bennett et Monsieur le Ministre Duclos,

    Re : Un seuil cumulatif proposé de 4,5 grammes en Colombie-Britannique

    Nous sommes une coalition de plus de 20 organisations de la société civile au Canada, représentant des personnes qui consomment de la drogue et leurs familles, des groupes autochtones et d’autres groupes racialisés, des fournisseurs de services, des organisations juridiques, des groupes de recherche et des militants de la politique en matière de drogues. Nous avons pour objectif d’abolir les lois pénales et autres lois, ainsi que les politiques et pratiques qui contrôlent, stigmatisent, pathologisent et punissent les personnes qui consomment de la drogue.

    Nous sommes conscients que Santé Canada évalue présentement la demande de la Colombie-Britannique pour obtenir une exemption à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances en vue de décriminaliser la possession simple jusqu’à une quantité seuil cumulative de 2,5 grammes. Cette quantité est déjà un seuil cumulatif considérablement trop bas pour de nombreuses personnes qui consomment des drogues ; elle a été rejetée à la quasi-unanimité par la « Core Planning Table on Decriminalization » de la Colombie-Britannique.

    Honorables ministres : un seuil cumulatif de 2,5 grammes ne repose sur aucune justification légale ou probatoire. En accord avec la recommandation de notre plateforme de 2021, nous vous prions de refuser cette quantité et de renoncer complètement aux quantités seuils.

    Nous vous avons communiqué à plusieurs reprises le risque important associé à la fixation d’un seuil qui ne reflète pas les habitudes de consommation réelles. Les marchés de la drogue se conformeront à ce seuil bas, en modifiant par exemple la puissance et les quantités de drogues disponibles ou vendues, ce qui pourrait augmenter le risque de surdose. Les autres effets néfastes d’un seuil de 2,5 grammes sont notamment le renforcement des interactions avec le marché non réglementé, alors que les personnes essaient d’éviter la criminalisation en achetant régulièrement de plus petites quantités. Les groupes les plus affectés par un seuil bas seront les communautés noires, autochtones et autres communautés racialisées, marginalisées et défavorisées, qui sont victimes de discrimination et qui sont arrêtées et incarcérées de manière disproportionnée pour des infractions liées à la drogue.

    Un seuil de 2,5 grammes est en contradiction avec l’engagement de votre gouvernement en faveur d’une politique des drogues fondée sur des preuves, de la lutte contre le racisme et pour la réconciliation avec les communautés autochtones. Cette mesure ne respecte pas les recommandations formulées par la Core Planning Table de la Colombie-Britannique et favorise les demandes non justifiées de la police, fondées sur la stigmatisation. Nous savons que Santé Canada a rencontré la police lors de son processus de prise de décision, tandis que les demandes de groupes dirigés par des personnes qui consomment des drogues, comme le « Vancouver Area Network of Drug Users » (VANDU), ont été entièrement ignorées.

    Il faut réussir la décriminalisation. Il vous incombe, sur les plans moral, juridique et éthique, de faire respecter les droits fondamentaux des personnes qui consomment de la drogue ; pour ce faire, il est indispensable que vous mettiez l’accent sur leur expertise. Un seuil de 2,5 grammes continuera à provoquer des dommages graves à nos communautés et il faut l’abandonner.

    Ainsi, nous vous demandons de 1. nous expliquer les arguments et fournir des preuves justifiant un seuil de 2,5 grammes ; et 2. nous rencontrer ce mois-ci afin d’assurer que les points de vue des personnes qui consomment des drogues sont prioritaires et que les recommandations de la BC Core Planning Table sont finalement adoptées.

    Signed,

    Avenue B Harm Reduction
    AVI Health and Community Services
    BC Association of Aboriginal Friendship Centres
    Blood Ties Four Directions
    British Columbia Centre on Substance Use
    British Columbia Civil Liberties Association
    CACTUS Montreal
    Canadian Association of People who Use Drugs (CAPUD)
    Canadian Drug Policy Coalition
    Canadian Students for Sensible Drug Policy
    Centre d’intervention et de prévention en toxicomanie de l’Outaouais (CIPTO)
    Centre on Drug Policy Evaluation
    Drug Users Advocacy League
    Drug User Liberation Front
    ENSEMBLE Services Greater-Grand Moncton
    Gilbert Centre
    HIV Legal Network
    Indigenous Harm Reduction Network
    Moms Stop the Harm
    Multidisciplinary Association for Psychedelic Studies Canada
    Ottawa Inner City Health
    Pivot Legal Society
    South Riverdale Community Health Centre
    Vancouver Area Network of Drug Users (VANDU)

    Additional signatures (added April 21, 2022 onwards)

    Association des intervenants en dépendance du Québec (AIDQ)
    Sandy Hill Community Health Centre
    EACH+EVERY: Businesses for Harm Reduction
    Sandy Hill Community Health Centre
    PAN
    Student Overdose Prevention and Education Network (SOPEN)
    Gilbert Centre

    Decriminalization Done Right: A Rights-Based Path for Drug Policy, 2021: https://www.hivlegalnetwork.ca/site/decriminalization-done-right-a-rights-based-path-for-drug-policy/?lang=en. 

    2 A. Greer et al, “The details of decriminalization: Designing a non-criminal response to the possession of drugs for personal use,” International Journal of Drug Policy 102 (2022) 103605.

  • Guide de terminologie critique

    Guide de terminologie critique

    Centres de compassion

    Les centres de compassion (ou « clubs d’acheteurs ») sont des « associations autonomes de personnes réunies volontairement pour répondre à leurs aspirations et à leurs besoins économiques, sociaux et culturels communs par le biais d’une entreprise détenue conjointement et gérée démocratiquement ».1 Ces centres sont apparus dans les années 1980 et 1990 en réponse à l’épidémie de sida; des personnes vivant avec le VIH/sida s’y procuraient du cannabis, qui était alors illégal, afin de gérer leur douleur. Aujourd’hui, ils sont encore des espaces sûrs où les membres peuvent se procurer une ou plusieurs substances, notamment de l’héroïne, tout en nouant des liens avec des pair-es aux idées semblables. Les modèles de centres de compassion varient : certains fonctionnent comme de petites initiatives clandestines, d’autres comme des initiatives plus ouvertes. Quoi qu’il en soit, ils font leur apparition lorsque l’inaction du gouvernement face à une crise – VIH/sida ou empoisonnements par des drogues – limite l’accès à des mesures de qui sauvent des vies.2

    Les centres de compassion diffèrent des modèles de distribution du marché et entretiennent les principes suivants : adhésion volontaire et ouverte; contrôle démocratique par les membres; participation économique des membres; autonomie et indépendance; éducation, formation et information; coopération entre coopératives; et souci de la communauté.1 En regroupant les commandes, les membres peuvent bénéficier de remises sur le volume, d’une protection des prix, d’installations partagées d’entreposage et de distribution, et d’autres économies d’échelle qui réduisent leurs coûts d’achat globaux.2 Cela se produit régulièrement dans la chaîne d’approvisionnement des soins de santé (p. ex., l’assurance maladie) et dans d’autres secteurs (p. ex., logement, épicerie).

    Le Drug User Liberation Front (DULF) de Vancouver a présenté un exemple de modèle de centre de compassion. Le 31 août 2021, des membres ont présenté au gouvernement fédéral une demande d’exemption en vertu de l’article 56(1) pour le DULF Fulfillment Centre and Compassion Club Model. Si elle est accordée, cette exemption permettra aux membres d’acheter légalement de la cocaïne, de l’héroïne et de la méthamphétamine de qualité pharmaceutique auprès d’un producteur dûment autorisé et réglementé, de stocker les substances en toute sécurité, de mettre en œuvre des mesures de contrôle de la qualité, d’emballer les substances de manière fiable et de les distribuer à une liste de membres sélectionnés.3

    A person outside an office building holding three white boxes
    Eris Nyx, Drug User Liberation Front (DULF), with community-led safe supply

    Loi réglementant certaines drogues et autres substances (LRCDS)

    La Loi réglementant certaines drogues et autres substances (LRCDS) est la loi fédérale canadienne sur le contrôle des drogues. Initialement adoptée en 1996 pour remplacer la Loi sur les stupéfiants et certaines parties de la Loi sur les aliments et drogues, elle sert également de loi de mise en vigueur de plusieurs traités internationaux de lutte contre la drogue. La LRCDS a établi huit « annexes » de substances, qui sont des catégories de drogues et de dispositifs de production, d’après leurs dangers perçus pour la sécurité personnelle et publique, et deux classes de « précurseurs » (composés utilisés pour produire des substances contrôlées). Les substances désignées à l’« Annexe 1 » sont considérées comme les plus dangereuses. Les infractions prévues par la LRCDS comprennent la possession, le cumul d’ordonnances médicales, le trafic, l’importation, l’exportation et la production de substances figurant aux annexes. Bien que la sanction de ces infractions dépende de l’annexe qui s’applique à la drogue en question, la LRCDS prévoit des peines d’emprisonnement obligatoires; de plus, les actes criminels les plus graves liés aux drogues sont passibles d’une peine maximale d’emprisonnement à perpétuité.4

    Notamment, la LRCDS stipule également : « Le gouverneur en conseil peut, par décret, modifier l’une ou l’autre des annexes I à IV, VI et IX pour y ajouter ou en supprimer tout ou partie d’un article dont l’adjonction ou la suppression lui paraît nécessaire dans l’intérêt public. » Plusieurs modifications ont été apportées à la Loi au fil du temps, qui ont toutes également nécessité la modification de la législation adjacente. Par exemple, en 2018, le Projet de loi C-45 : Loi concernant le cannabis et modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le Code criminel et d’autres lois a été adopté au Parlement. Cela a entraîné l’abrogation de multiples articles de la LRCDS ainsi que la modification d’articles du Code criminel, du Règlement sur les stupéfiants, du Règlement sur le chanvre industriel, de la Loi sur la santé des non-fumeurs, de la Loi sur le casier judiciaire et de la Loi sur l’identification des criminels, entre autres.5

    Criminalisation

    Le terme « criminalisation » désigne les sanctions pénales directes et indirectes pour toute activité interdite, en lien avec la drogue, dans la LRCDS. Bien que certaines formes de criminalisation soient évidentes (p. ex., les condamnations au criminel pour possession simple ou trafic de drogue), d’autres le sont moins. Par exemple, de nombreuses circonstances associées à la pauvreté sont implicitement criminalisées ou rendent les personnes plus vulnérables à la criminalisation, qu’elles aient ou non enfreint la loi. Cette dynamique manifeste par des « rafles de rue », au cours desquelles la police confisque et jette régulièrement les affaires de personnes non logées, ce qui expose ensuite cette population à des fouilles à la recherche de drogues illégales. Même si ces personnes ne reçoivent pas de peines formelles pour possession, leurs drogues peuvent être saisies et elles peuvent alors être incitées à commettre des crimes d’acquisition (p. ex., des vols) ou à s’engager dans d’autres activités illégales pour se procurer d’autres drogues. Dans ce contexte, le terme « criminalisation » fait donc référence à la nature cyclique et aux renforcements mutuels de la pauvreté, de la surveillance et des infractions liées à la drogue, ainsi qu’à l’impact que cela a sur la psyché d’une personne.

    Décriminalisation

    Le terme « décriminalisation » fait référence à une série de politiques et de pratiques qui remplacent les sanctions criminelles par des peines d’autre nature, pour certaines activités. Il n’existe pas de cadre réglementaire unique pour la décriminalisation; et les interprétations de ce en quoi consiste la décriminalisation, de la manière dont les activités anciennement criminalisées devraient être traitées par la police, la médecine et l’État, et de la mesure dans laquelle ces nouveaux traitements devraient être appliqués sur une base discrétionnaire ou codifiés dans la loi, varient considérablement. En ce qui concerne les substances contrôlées, la décriminalisation s’étend sur un continuum de catégories législatives allant de la criminalisation (situation la plus contraignante) à la décriminalisation, jusqu’à la légalisation et à la réglementation (situation la plus libérale).

    La décriminalisation de facto implique que les sanctions criminelles pour les activités liées aux substances contrôlées sont appliquées de manière informelle. Autrement dit, la possession et la distribution de substances contrôlées demeurent illégales, mais la police peut recevoir l’ordre de ne pas appliquer ces lois. En Colombie-Britannique, il existe des divergences entre les rapports de la police et ceux des personnes qui consomment des drogues, quant à la mesure dans laquelle la possession simple a effectivement été décriminalisée. Plus précisément, une analyse de 2020 des arrestations provinciales liées à la drogue remontant à 2014 a révélé que les accusations de possession de drogue ne sont pas cohérentes d’une région à l’autre.6 En outre, même si une personne n’est pas arrêtée ou accusée de possession de drogue, les personnes consommatrices de drogues qui sont visibles (p. ex., les personnes sans logement, en particulier si elles sont racisées et/ou travailleuses du sexe) peuvent quand même se voir confisquer leur drogue par la police. Cela témoigne des avantages de la décriminalisation de jure [c.-à-d. par la loi] qui se traduit par des politiques et une législation limitant les pouvoirs discrétionnaires de la police.

    Il existe de nombreuses voies possibles vers la décriminalisation. À l’échelon municipal, tout membre d’un conseil municipal, d’un conseil de santé municipal ou le/la médecin-hygiéniste local-e peut demander une exemption en vertu de l’article 56(1) de la LRCDS s’appliquant à une catégorie de personnes ou à une région géographique spécifique.7 Au palier provincial, une option en Colombie-Britannique consiste à modifier la Police Act (Loi sur la police) provinciale afin de permettre au ministre de la Sécurité publique et du Solliciteur général d’établir des priorités provinciales générales en ce qui concerne les personnes qui consomment des drogues. Cela pourrait inclure la déclaration d’une approche de santé publique et de réduction des méfaits en tant que mandat provincial et la mise en place de mécanismes permettant à la police de diriger les personnes vers des services sociaux et de santé. La possession d’une petite quantité de drogue pour usage personnel passerait du statut d’acte criminel (avec possibilité de peine d’emprisonnement) à celui d’infraction administrative. La deuxième option, plus formelle, consiste à élaborer un nouveau règlement dans le cadre de la Police Act afin d’inclure une disposition empêchant, en vertu de l’article 4(1) de la LRCDS, tout membre d’un service de police de la C.-B. de consacrer des ressources à l’application des dispositions criminelles sur la possession simple. La médecin-hygiéniste de la Colombie-Britannique, la Dre Bonnie Henry, a recommandé à la province d’examiner de toute urgence l’une de ces deux options en 2019.8 Enfin, comme dans le cas des municipalités, les acteurs gouvernementaux, y compris le médecin-hygiéniste en chef, le premier ministre, des ministres provinciaux (de la Santé, de la Santé mentale et des Dépendances, de la Justice et du Procureur général, de la Sécurité publique, ou le solliciteur général) peuvent également demander une exemption en vertu de l’article 56(1) de la LRCDS afin de l’appliquer à une catégorie de personnes ou à une région géographique particulière si cela est jugé dans l’intérêt public.

    EN SAVOIR PLUS : RÉUSSIR LA DÉCRIMINALISATION : une voie vers des politiques sur les drogues basées sur les droits de la personne 

    Au palier fédéral, le ministre de la Santé dispose d’un large pouvoir pour exempter des personnes ou des régions des dispositions de la LRCDS (p. ex., l’interdiction criminelle de la possession simple) sans avoir à consulter le Parlement. Nous avons vu cela se produire dans le cas de certains sites de consommation supervisée (SCS) et à des fins de recherche. Notamment, les provinces et les municipalités peuvent également demander au gouvernement fédéral des exemptions sur leur territoire.7

    RCMP police cruiser; Maple Ridge

    La décriminalisation comporte des avantages et des inconvénients. Les données disponibles démontrent qu’elle est un cadre efficace pour encourager l’utilisation des services sociaux et de santé par les personnes qui consomment des drogues et pour réduire la criminalité et les troubles sociaux, les déchets liés à la drogue, la consommation de drogues en public et les accusations générales liées à la drogue.9 Toutefois, ces données masquent les limites de la décriminalisation. Premièrement, la décriminalisation ne modifie pas fondamentalement la volatilité du marché de la drogue. Cela signifie que les personnes qui consomment des drogues ne sont pas moins susceptibles de rencontrer des substances contaminées et ne sont pas plus protégées contre les surdoses et/ou les décès accidentels que dans un contexte où la consommation de drogues est criminalisée. Ensuite, l’application discrétionnaire de la loi a un impact disproportionné sur les personnes pauvres et racisées. Les personnes qui ont un logement stable et qui peuvent consommer discrètement ne sont pas sous surveillance et leurs drogues sont donc rarement confisquées. En outre, les mécanismes de déjudiciarisation introduits en lieu et place des sanctions pénales ne sont pas toujours appropriés. Le modèle portugais de décriminalisation, introduit en 2000 et souvent cité comme un exemple de réforme réussie, n’aborde pas valablement la violence, la stigmatisation, le déplacement et la discrimination que vivent les personnes qui consomment des drogues. De plus, comme la police demeure tenue de fouiller et de détenir les personnes soupçonnées de posséder des drogues, de nombreuses personnes prises en possession de drogues sont toujours maltraitées, mais cette fois-ci « officieusement », et/ou obligées de collaborer avec le système médical et de suivre un traitement de la toxicomanie, même contre leur gré, comme voie d’évitement à l’incarcération.10

    Drogue

    Toute substance chimique dont la consommation modifie des processus psychologiques et/ou physiologiques (corporels). Une drogue peut être légale à la consommation, illégale à la consommation, ou légale à la consommation seulement pour des personnes spécifiques dans des circonstances spécifiques.

    Parmi les exemples de drogues dont la consommation est habituellement ou toujours légale, on trouve l’alcool, la caféine, la nicotine, les médicaments, les antidépresseurs et les antipsychotiques. Les exemples de drogues dont la consommation est habituellement ou toujours illégale incluent la cocaïne, le crack, l’héroïne et la méthamphétamine. Ces dernières drogues sont plus souvent appelées « drogues de l’abus », car elles sont considérées comme plus susceptibles de provoquer une dépendance mentale ou physique chez l’utilisateur(-trice).

    La légalité ou l’illégalité d’une drogue est plus complexe que ne le pensent certaines personnes. Par exemple, il est illégal d’acheter du fentanyl dans la rue, mais les médecins peuvent légalement en prescrire à des patient-es hospitalisé-es, pour gérer la douleur. De même, il est légal pour les adultes d’acheter de l’alcool dans des établissements agréés, mais on ne peut pas en consommer dans la plupart des lieux publics. Les enfants ne peuvent jamais acheter ou consommer de l’alcool légalement. Le cannabis, quant à lui, qui était autrefois illégal pour tous et toutes est à présent légal pour les adultes, qui peuvent l’acheter auprès de dispensaires agréés. Enfin, un médicament comme le Ritalin, qui est légalement prescrit à des enfants et à des adultes pour traiter les symptômes du trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH), une différence de développement neurologique diagnostiquée cliniquement, est chimiquement quasi identique à la méthamphétamine, dont la fabrication, la distribution ou l’achat sont illégaux pour tous et toutes.

    Le niveau de risque ou de dangerosité d’une drogue est lié à la façon dont le public la perçoit. Les lois et politiques qui régissent l’accès à une drogue déterminent également le degré de sécurité de sa consommation. Il est important de se rappeler que l’accès à une drogue (ainsi que les sanctions pour sa consommation illégale) dépend de plusieurs facteurs, dont la plupart ne sont pas liés à la structure chimique de la drogue.

    Consommation de drogue(s)

    Introduction dans le corps de toute substance chimique qui modifie l’état mental et/ou physique d’une personne. Les formes les plus courantes de la consommation de drogues sont l’ingestion, l’aspiration (sniffer), l’inhalation, le « fumage » et l’injection.

    Dépendance à une drogue

    État de besoin mental et/ou physique d’une ou de plusieurs drogues. En général, la dépendance se développe avec le temps et est précédée d’une augmentation de la tolérance physique à la (ou aux) drogue(s). L’absence de la drogue peut induire des symptômes physiques de sevrage allant de légers à très sévères, et peut également s’accompagner d’un malaise mental et/ou émotionnel. Les caractéristiques de consommation de drogue(s), y compris la durée et la fréquence de l’utilisation, peuvent laisser présager une dépendance, mais ce n’est pas toujours le cas. Enfin, la dépendance ne concerne pas seulement les drogues illégales : la caféine, l’alcool, le tabac et certains médicaments d’ordonnance peuvent également induire une dépendance.

    Crise des drogues empoisonnées

    Une expression plus appropriée pour désigner une situation que l’on appelle parfois « l’épidémie d’opioïdes » ou « la crise des surdoses d’opioïdes ». Au Canada, il n’est plus exact d’attribuer les taux de surdose et de décès accidentels aux opioïdes proprement dits, car il est pratiquement impossible de se procurer des versions non altérées de ces drogues en dehors des contextes médicalement réglementés. De plus, les personnes qui consomment des stimulants et d’autres substances non opiacées sont maintenant affectées par l’approvisionnement en drogues toxiques. Ce changement de terminologie reconnaît, comme il se doit, que les surdoses accidentelles sont principalement causées par les politiques sur les drogues, et non par les drogues à proprement parler. Plus précisément, la prohibition déstabilise le marché des drogues, et les personnes qui consomment (et vendent) des drogues ne savent pas ce qu’elles obtiennent et peuvent donc consommer davantage d’une substance, une substance différente (ou plusieurs), ou une combinaison dangereuse de substances. Le Réseau canadien d’info-traitements sida (CATIE) explique :

    « Du fait de leur interdiction, les drogues sont devenues plus concentrées. En fait, l’interdiction des drogues incite à fabriquer et à vendre des produits de plus petit format et plus puissants, de manière à réduire les volumes de production et de transport et à augmenter les profits.6 C’est la raison pour laquelle le fentanyl et ses analogues, des substances beaucoup plus puissantes que l’héroïne à des doses beaucoup plus faibles, ont inondé l’approvisionnement en drogues illicites et ont été associés à l’augmentation des décès liés aux surdoses. »11

    (Interactive Graph)

    Vente de drogue / commerce de drogue

    La vente de drogue consiste à distribuer de petites quantités de drogues illégales (ou de drogues légales, mais distribuées dans l’illégalité). La vente de drogue est une stratégie de génération de revenus utilisée par de nombreuses personnes qui consomment des drogues, en particulier celles qui déclarent en consommer quotidiennement.12 Bien que les conceptions populaires de la vente de drogue soient qu’il s’agit d’une activité prédatrice ou immorale, des recherches démontrent que : a) les personnes qui consomment des drogues et celles qui en vendent sont souvent les mêmes personnes; b) les personnes qui vendent des drogues ont tendance à avoir des relations positives avec celles à qui elles les vendent; et c) les personnes qui vendent des drogues participent régulièrement à des pratiques de soins qui réduisent les méfaits d’un approvisionnement en drogues toxiques (p. ex., avoir du naloxone, répondre à une surdose, développer des relations avec les acheteur(-euse)s).

    La Drug Policy Alliance note également que les lois antidrogue aux États-Unis sont rédigées de manière si générale que les personnes prises en flagrant délit de possession de drogue pour leur usage personnel sont souvent accusées de vente de drogue, même si elles n’en font aucune vente ni distribution.13 Au Canada, bien que le système juridique ait évolué pour se concentrer sur les « vendeur(-euse)s de haut niveau » (ou « trafiquants ») en théorie, et que la « vente de drogue » ne soit pas une infraction en vertu de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances (LRCDS), les vendeur(-euse)s de bas niveau demeurent ciblé-es par la police.

    Trafic de drogue

    L’article 2 de la LRCDS définit le « trafic » comme incluant tout acte de vente, d’administration, de don, de transfert, de transport, d’envoi ou de livraison d’une substance contrôlée – ou toute offre de faire l’une de ces choses – à moins d’être autorisé-e par un règlement, que ce soit à titre lucratif ou gratuit. L’article 6(1) de la LRCDS interdit également l’importation de substances contrôlées au Canada, tandis que l’article 7(1) en interdit la production.

    En vertu de l’alinéa 5(1) de la LRCDS, « trafic » signifie, en ce qui concerne toute drogue inscrite aux Annexes I à V :

    • (a) la vente, l’administration, le don, le transfert, le transport, l’expédition et la livraison d’une telle substance; et
    • (b) la vente d’une autorisation visant l’obtention d’une telle substance.4

    Les peines criminelles pour le trafic varient en fonction de facteurs tels que le lieu où l’infraction a été commise, si l’accusé-e est lié-e à une organisation criminelle, s’il/elle a fait usage de violence en commettant l’infraction, s’il/elle a déjà été condamné-e pour une infraction liée à une substance désignée, si des mineur-es sont impliqué-es, et si la poursuite traite l’infraction comme un acte criminel (plus grave) ou comme une condamnation sommaire (moins grave). Autrement dit, il existe une grande diversité parmi les personnes accusées de trafic et dans les peines qui leur sont infligées. La peine maximale encourue en cas de condamnation pour trafic ou possession en vue du trafic est l’emprisonnement à perpétuité (pour une substance de l’annexe I ou II); ou un emprisonnement de dix ans (pour une substance de l’annexe III ou V) ou de trois ans (pour une substance de l’annexe IV). Des peines minimales sont également prévues pour certaines infractions.

    Il est essentiel de reconnaître que le trafic de drogue au Canada est lié au commerce mondial de drogues illégales. La demande de drogues existe, et la prohibition a créé les conditions permettant à des organisations criminelles transnationales de prendre le contrôle complet de la chaîne d’approvisionnement. Par exemple, les systèmes carcéraux surpeuplés d’Amérique latine et des Caraïbes ont été décrits comme « des centres de recrutement et des incubateurs presque parfaits pour le crime, puisque des groupes criminels organisés en sont venus à contrôler l’économie de la drogue dans les prisons et à utiliser les installations comme bases pour contrôler les opérations de trafic à l’extérieur ».14 Une perspective internationaliste est donc essentielle lorsqu’on examine comment le Canada influence le trafic et est influencé par lui. Les régions touchées par l’expansion impérialiste de l’Occident sont un terrain fertile pour des « guerres de territoire » volatiles; de surcroît, il existe de fortes incitations à maintenir le contrôle des routes de transit, avec le soutien de gouvernements corrompus et des réponses militarisées, exacerbant la violence locale.15 Au Canada, les approches prohibitionnistes de l’importation de drogues garantissent également qu’elle se fait par des moyens illicites tels que le blanchiment d’argent. Les tenant-es de la réglementation légale soulignent donc que les cadres réglementaires axés sur la justice doivent tenir compte de l’impact que cela aurait sur les communautés qui ne sont pas directement touchées par la loi fédérale canadienne, tout en considérant la déstabilisation occidentale du sud mondial comme cause et effet du trafic.

    Insi
    Insite, North America’s first sanctioned supervised consumption site

    Réduction des méfaits

    La réduction des méfaits est un mouvement de justice sociale fondé sur la conviction que les personnes qui consomment des drogues ont les mêmes droits humains que toute personne et que ceux-ci sont inaliénables.16 Les premier(-ère)s qui ont proposé cette approche se sont inspiré-es des militant-es pour les droits LGBTQIA+ pour mettre en œuvre des pratiques de soins qui protègent la vie, la liberté et l’autonomie de ceux et celles qui souffrent à cause de la prohibition. Ces pratiques incluent la distribution de fournitures (p. ex., des seringues neuves, des condoms), l’ouverture de sites de consommation supervisée, l’offre de diverses formes de soutien communautaire, l’aide mutuelle et la désobéissance civile. Par conséquent, la réduction des méfaits s’inscrit habituellement en opposition à l’État. Cependant, sa signification a évolué et certaines personnes s’inquiètent aujourd’hui d’une certaine appropriation de la réduction des méfaits par des professionnel-les de la médecine, des organismes à but non lucratif et des services sociaux dont les valeurs ne sont pas la libération de la guerre aux drogues et de ses antécédents.17 Par exemple, il arrive souvent que l’accès à des soins médicaux soit conditionnel à la volonté d’une personne de fournir une pièce d’identité et de voir ses déplacements surveillés par des employé-es. Dans notre contexte actuel, la réduction des méfaits peut donc désigner soit des programmes parrainés par l’État pour réduire les conséquences physiques de la consommation de drogues illégales, soit des pratiques de soins communautaires de proximité.

    Médicalisation

    Généralement parlant, la « médicalisation » fait référence aux processus sociaux, économiques et politiques par lesquels le comportement humain finit par être défini et traité dans une approche médicale. Historiquement, l’institution de la médecine avait une portée étroite et un champ d’action limité : elle ne touchait que des phénomènes très spécifiques, et l’influence des professionnel-les de la médecine sur le monde social était limitée. Au fil du temps, cependant, et en particulier depuis un siècle, ce qui était auparavant considéré comme des problématiques humaines « normales » a été de plus en plus étiqueté comme des problèmes à diagnostiquer et à résoudre par la médecine.18

    La médicalisation se produit à trois niveaux. Conceptuel – le vocabulaire médical est utilisé pour « ordonner » ou définir le problème en cause. Institutionnel – des organismes du domaine médical s’impliquent dans la définition et le traitement des problèmes et les professionnel-les de la santé agissent comme des « chiens de garde » ou des « auteur-es de revendications légitimées par des institutions », qui détiennent l’exclusivité d’accès au traitement par le biais d’établissements spécialisés (hôpitaux, centres de désintoxication, centres de traitement de la toxicomanie). Interactionnel – la compréhension médicale des phénomènes façonne nos relations interpersonnelles.23 En pratique, le fait de mettre l’accent sur la nature socialement construite de la « maladie » nous permet de remettre en question des hypothèses qui sont considérées comme étant véridiques, au sujet des origines et des effets des drogues, de la consommation de drogues et des politiques en la matière. Cela nous incite également à examiner quels acteurs et quelles institutions ont l’autorité de déterminer les significations que nous attachons à un comportement considéré comme « anormal » ou « déviant », et quelles sont leurs motivations de base. En clair, nous devrions nous demander à qui profite le fait de qualifier les gens de « malades » et dans quel(s) but(s).

    L’émergence des diagnostics de « troubles liés à la consommation de substances » est un exemple de la médicalisation de la consommation de drogues. Ces étiquettes sont des ajouts récents au Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, Fifth Edition [Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, 5e édition] (DSM-5); leur inclusion a nécessité un lobbying considérable de la part de psychiatres et d’autres acteurs médicaux. Le fait de faire de la consommation de substances psychoactives un élément médical présente des avantages et des inconvénients (voir « Trouble lié à la consommation de substances »), mais surtout, cela montre clairement que la politique est aussi importante que la science, sinon plus, dans la « création » de diagnostics. Il n’est pas certain que l’élargissement des catégories de maladies et de troubles conduise à des résultats plus équitables pour les personnes qui consomment des drogues. Quoi qu’il en soit, le fait que la consommation de drogues soit appelée « trouble » n’est ni politiquement neutre ni objectivement « vrai » – ceci est en négociation.

    Approvisionnement sécuritaire

    L’Association canadienne des personnes qui utilisent des drogues (ACPUD) définit l’approvisionnement sécuritaire (ou « approvisionnement sûr ») comme « un approvisionnement licite et réglementé de drogues ayant des propriétés susceptibles de modifier l’état psychique ou corporel et qui, traditionnellement, ne peuvent être obtenues que sur le marché illicite ».19 Il s’agit de distribuer des drogues réglementées (de qualité pharmaceutique), par des moyens légaux, et de permettre à une personne de savoir précisément ce qu’elle consomme et en quelle concentration. Comme la réduction des méfaits, le concept d’approvisionnement sûr est enraciné dans les principes des droits humains pour tous les individus, indépendamment de la manière ou de la raison pour laquelle une personne choisit de modifier ses processus cognitifs, affectifs et physiologiques. L’approvisionnement sûr n’est pas la même chose que le traitement par agonistes opioïdes (TAO) ou d’autres thérapies de substitution qui peuvent être prescrites pour remplacer la consommation de drogues.

    Protester at Vancouver safe supply rally
    Safe supply rally; Vancouver; 2021

    Au Canada, il est difficile d’obtenir accès à un approvisionnement sécuritaire. Actuellement, le gouvernement fédéral stipule que les professionnel-les de la santé (p. ex. médecins, infirmier(-ère)s praticien-nes, pharmacien-nes) peuvent prescrire des opioïdes, des stimulants et des benzodiazépines en se fondant sur leur jugement professionnel.20 Cependant, il est courant qu’une personne qui souhaite avoir accès à un approvisionnement sécuritaire doive commencer par obtenir un diagnostic de « trouble lié la consommation de substances », ce qui établit à tort une association entre la consommation de drogues et la dépendance, en ne tenant pas compte du fait que des personnes font une consommation de drogues qui est récréative. De plus, les drogues ne sont pas toutes disponibles dans le cadre des modèles actuels (p. ex., l’obtention d’héroïne nécessite de s’inscrire à un programme hautement spécialisé); elles ne sont pas toutes dispensées sous la forme préférée de certain-es utilisateur(-trice)s (p. ex., les drogues sous forme injectable sont exclues) et la plupart des gens ne sont pas en mesure d’en emporter chez eux ou de « transporter » une quantité supérieure à une dose limitée de leur ordonnance. En outre, des décisions imprévisibles, établies par l’adoption de politiques sans consultation des consommateur(-trice)s sont également des points de tension;21 et les écarts entre l’offre et la demande sont particulièrement prononcés en région éloignée et rurale. Bien que des changements mineurs au cours de la pandémie de COVID-19 aient légèrement amélioré l’obtention d’ordonnances, la logistique pour en obtenir une est extrêmement tortueuse.

    Contrôle social

    Façon par laquelle la société régule l’action humaine pour maintenir le statu quo. Des mécanismes tels que les règles, les normes, les lois et les politiques s’exercent entre les personnes et par le biais d’institutions ou d’établissements pour interdire le changement. Pour ce qui est de décourager la consommation de drogues illégales, le contrôle social est à la fois formel (p. ex., les sanctions pénales) et informel (p. ex., l’humiliation). De même, des contrôles à caractère positif existent pour récompenser les personnes qui ne consomment pas de drogues ou qui réduisent ou cessent leur consommation. Il s’agit notamment de mécanismes tels que l’assouplissement de sanctions pénales après des périodes d’abstinence, l’autorisation de reprendre le travail après un résultat négatif à un dépistage de drogues et les félicitations des ami-es et de la famille pour s’être « rétabli » ou « être devenu sobre ». Le contrôle social est partout, et il est important de reconnaître qu’il profite principalement aux personnes dont le pouvoir sociétal exige une conformité généralisée.

    Un mécanisme crucial de contrôle social qui touche la consommation de drogues est la médecine. Les origines du contrôle social médical remontent au XVIIIe siècle, époque à laquelle l’Occident a connu une série de crises économiques. Les villes étaient de plus en plus préoccupées par la productivité sous le capitalisme; la « normalité » et la « moralité » se définissaient presque exclusivement par la capacité d’une personne à générer un surplus de richesse pour les grands producteurs. Simultanément, la science a remplacé la religion comme institution dominante de la régulation sociale. Avec l’introduction de la laïcité et de la démocratie, l’État avait besoin de nouveaux moyens pour réglementer ses citoyen-nes. Il l’a fait par le biais de la « science » de la psychiatrie, qui n’existait pas auparavant. En qualifiant les chômeur(-euse)s de « malades mentaux » ou de « malades », il justifiait leur enfermement dans des établissements de travail forcé, dont l’héritage se fait sentir encore aujourd’hui.22 Bien que les « patient-es » ne soient plus obligé-es de travailler pendant un enfermement, l’idée selon laquelle l’incapacité à le faire indique une « maladie du cerveau » ou un « trouble mental » est la prémisse de nombreux soins psychiatriques et liés à la dépendance.

    Dans la pratique, le contrôle social médical formel concernant la consommation de drogues se manifeste par : l’hospitalisation non volontaire; l’obligation de fournir des documents médicaux détaillés pour avoir accès à un approvisionnement sûr ou à une thérapie de substitution; des stratégies policières qui « détournent » les personnes prises en flagrant délit de consommation de drogues vers des tribunaux de traitement de la toxicomanie; et des tests d’urine obligatoires comme condition pour conserver un logement et un emploi. Le contrôle social informel de la consommation de drogues se manifeste dans le fait que des médecins et des professionnel-les de la santé affirment que les troubles liés à la consommation de drogues sont de la propre faute de la personne touchée; dans l’encouragement aux personnes à se considérer comme « malades » lorsqu’elles consomment des drogues, en particulier dans les programmes en douze étapes qui encouragent une autosurveillance quasi religieuse; dans le fait que des étranger(-ère)s qualifient de « junkies » ou de « toxicomanes » les personnes qui consomment des drogues; ainsi que dans le mythe répandu selon lequel des médicaments prescrits par un médecin, comme ceux qui sont donnés aux personnes atteintes de TDAH ou d’autres troubles, soient plus respectables que les drogues vendues dans la rue, même lorsqu’ils ont des effets semblables.5

    https://www.youtube.com/watch?v=ha4yeOF6XNQ

    Stigmatisation

    La description la plus courante de la stigmatisation est celle du sociologue Erving Goffman, qui l’a définie comme un « attribut jetant un profond discrédit » et ayant pour effet d’« entacher » l’identité d’une personne par rapport au groupe dominant. Il a catégorisé trois types de stigmates : ceux liés à « l’abomination du corps » (p. ex., un handicap physique); ceux qui suscitent des réactions « tribales » (p. ex., la race, la religion); et ceux qui découlent de « traits de caractère » (p. ex., la consommation de drogues, la maladie mentale, le statut VIH).24 Publiée en 1963, la théorie de Goffman n’est plus d’actualité mais conserve son influence. Par exemple, le Gouvernement du Canada définit la stigmatisation comme des « attitudes, croyances ou comportements négatifs à l’égard d’un groupe de personnes en raison de leur situation personnelle ». Ceci ne présente qu’un portrait limité des causes et des mécanismes en jeu dans l’émergence de la stigmatisation, des personnes qui en tirent profit et des différents facteurs qui contribuent à son maintien.

    Notamment, la stigmatisation n’est pas stable. La stigmatisation d’une certaine caractéristique est constamment négociée et renégociée, et évolue avec le temps.25 Il suffit de penser à l’homosexualité, qui était autrefois criminalisée et qui a ensuite été citée comme un trouble mental dans des textes psychiatriques. Bien que l’identité queer soit encore considérée comme « anormale » dans certains contextes, les réactions générales à son égard ont considérablement évolué, parallèlement à la législation, aux politiques et aux tendances médicales évolutives. Il en va de même pour la consommation de drogues. Avant la mise en œuvre des lois antidrogue, et bien avant que les « troubles liés à la consommation de substances » ne constituent un diagnostic officiel, la consommation de drogues était considérée comme neutre. Elle a été stigmatisée dans l’escalade de la « guerre aux drogues », tout comme les inégalités raciales, ethniques, religieuses et de classe. Il est important de se rappeler que les changements dans la perception du public sont le fruit de l’activisme de la base et de la désobéissance civile, tant en matière de sexualité que de consommation de drogues.

    Par ailleurs, la stigmatisation n’est pas seulement interpersonnelle. Elle est plus profonde que les attitudes et comportements individuels, et devient institutionnalisée et systémique lorsque des politiques officielles (en matière de logement, d’emploi, d’éducation, de protection de l’enfance, etc.) interdisent l’accès sur la base de l’identification à une classe particulière. Par exemple, la participation obligatoire à des réunions en douze étapes comme condition pour éviter la réincarcération reflète ce dernier type de stigmatisation. Il en va de même des exigences imposées aux professionnel-les de la santé qui ont suivi un traitement de la toxicomanie et qui doivent se soumettre régulièrement à des tests de dépistage de drogues pour conserver leur emploi.

    Enfin, la stigmatisation devient intériorisée. Les recherches sur ce phénomène ont conclu à maintes reprises que le fait de se considérer comme « mauvais-e », « fou/folle » et/ou « malade », ce qui est le résultat de la stigmatisation institutionnalisée et systémique, entraîne des résultats négatifs.26 En anticipant le rejet, il arrive que des personnes stigmatisées modifient leur comportement en fonction de ces attentes, ce qui a pour effet que leurs conditions matérielles se détérioreront. Cela est particulièrement vrai pour les personnes qui sont stigmatisées à de nombreux égards, ce qui indique que la consommation de drogues à elle seule n’est pas une condition suffisante pour être stigmatisé. Les personnes qui consomment des drogues mais qui ont par ailleurs un logement stable et un emploi et qui appartiennent aux groupes raciaux et culturels dominants peuvent consommer en quasi-impunité. Par conséquent, des campagnes de lutte contre la stigmatisation axées uniquement sur la consommation de drogues pourraient ne pas être efficaces, car il ne s’agit que d’une facette de l’identité individuelle.

    Trouble lié à la consommation de substance(s) (TCS)

    Une catégorie de troubles qui reflète l’étiquette médicale de la dépendance. Le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, cinquième édition (DSM-5), texte officiel sur lequel se fondent les diagnostics en Amérique du Nord, identifie 11 critères relatifs aux TCS, dont « l’usage dans des situations dangereuses » (utiliser une substance d’une manière dangereuse pour soi-même et/ou pour les autres), « des problèmes interpersonnels ou sociaux » liés à la consommation, et le fait de « passer beaucoup de temps à obtenir la substance, à l’utiliser ou à récupérer de ses effets ». Pour qu’une personne soit diagnostiquée d’un TCS, elle doit présenter au moins deux de ces symptômes sur une période de douze mois. Cette catégorie de diagnostics repose sur la supposition selon laquelle la consommation de drogues se fait « contre son gré », de manière aberrante, chaotique et compulsive.

    La profession médicale considère le TCS comme une maladie cérébrale ou un trouble mental incurable, ce qui a des conséquences pour les personnes qui consomment des substances. Nous l’avons mentionné, des recherches sur la stigmatisation indiquent que l’étiquette de « maladie mentale » suscite la méfiance de la part de professionnel-les et au sein du public. Les personnes ayant un « TCS » sont perçues comme étant moins susceptibles de conserver un emploi ou d’être financièrement responsables, même si ces préjugés sont inconscients, voire intériorisés.26 En contrepartie, la notion de TCS en tant que maladie peut susciter la sympathie d’autrui; elle est préférable à la criminalisation; et sa présence au dossier médical peut être nécessaire pour accéder à un approvisionnement sûr et à d’autres soins de santé.

    Bref, il n’existe pas de définition commune des TCS. Des chercheur(-euse)s critiques, des personnes qui consomment des drogues et des militant-es pour leurs droits soulignent que plusieurs critères du TCS sont spécifiques à l’environnement. Par exemple, le fait qu’une personne ait ou non des « problèmes sociaux ou interpersonnels » liés à la consommation dépendra des normes de son réseau de pair-es, de sa situation de logement, de ses antécédents de condamnation pour consommation de drogues, de son obligation de se soumettre à des dépistages de drogues pour conserver un emploi et de la fréquence à laquelle elle consomme des drogues en public. De même, le temps qu’elle consacre à l’acquisition de drogue(s) dépend de sa situation financière et de son milieu de consommation. Enfin, lorsque deux personnes présentent un comportement identique, il est possible qu’une seule soit mise au courant de son TCS et que l’autre puisse se retrouver en prison sur la base de sa race et de sa classe sociale. Aux fins du présent document, l’expression « trouble lié à la consommation de substance(s) » sera utilisée pour désigner un diagnostic médical officiel.

    Guerre aux drogues

    De manière générale, la guerre aux drogues consiste en une série de politiques, de pratiques et de lois introduites au cours du 20e siècle afin de criminaliser la consommation de drogues et les activités qui s’y associent. Il est à présent bien établi que la soi-disant guerre aux drogues est une guerre par ricochet qui a pour véritables « ennemis » les communautés racisées, immigrantes et pauvres. Depuis 110 années, les lois antidrogue ont été une tactique efficace pour empêcher l’avancement économique, politique et social des personnes dont le mode de vie diffère de celui que l’État colonisateur juge idéal.

    Au Canada, la guerre aux drogues coïncide officiellement avec les émeutes anti-asiatiques. Les tensions étaient déjà vives entre les Chinois, établis sur la côte ouest depuis la construction du chemin de fer du Canadien Pacifique (CP), et les colons blancs qui se sentaient menacés en raison d’un manque perçu d’occasions d’emploi et de leurs préjugés racistes à l’égard des immigrants non blancs et non chrétiens. Le 7 septembre 1907, animées par une crainte de « déclin moral » dû au « mélange racial », 9 000 personnes, dont des dirigeants politiques et syndicaux, ont manifesté devant l’hôtel de ville de Vancouver pour s’opposer à l’immigration. Certaines ont vandalisé et détruit des entreprises chinoises et japonaises. Plutôt que de se concentrer sur les réparations, le sous-ministre du Travail Mackenzie King, dépêché d’Ottawa pour enquêter, a conclu que l’opium que les Chinois utilisaient à des fins festives et économiques devrait être interdit. Il a déclaré :

    « Les Chinois avec qui j’ai conversé sur le sujet m’ont assuré que l’on vendait presque autant d’opium aux blancs qu’aux Chinois, et que la consommation d’opium se répandait non seulement chez les hommes et les garçons blancs mais aussi chez les femmes et les jeunes filles. Ne pas se préoccuper de la croissance d’un tel mal au Canada serait contraire aux principes de moralité qui devraient guider les actions d’une nation chrétienne ».27

    L’usage récréatif d’autres drogues a été interdit dans les années qui ont suivi, et lorsque le président étatsunien Richard Nixon a officiellement déclaré la « guerre aux drogues » en 1971, la propagande antidrogue s’était consolidée dans l’imaginaire collectif. Au cours des années 70, les peines pour possession et distribution de drogues ont connu une intensification, tout comme les disparités raciales dans les arrestations, les condamnations pénales pour possession et la sévérité des peines. La guerre aux drogues a toujours été motivée par des valeurs et objectifs économiques blancs et chrétiens, à un point tel qu’un collaborateur de Nixon a éventuellement admis :

    « Vous cherchez le fond de l’histoire. La campagne de Nixon en 1968 et son administration par la suite avaient deux ennemis : la gauche antiguerre et les Noirs. Vous comprenez ce que je veux dire. Nous savions que nous ne pouvions pas rendre illégal le fait d’être contre la guerre ou d’être noir, mais en amenant le public à associer les hippies à la marijuana et les noirs à l’héroïne, puis en criminalisant fortement les deux, nous pouvions perturber ces communautés. Nous pouvions arrêter leurs leaders, perquisitionner leurs demeures, interrompre leurs réunions et les vilipender sans relâche aux nouvelles du soir. Étions-nous conscients de nos mensonges à propos des drogues? Bien sûr que oui. »28

    Depuis, en dépit–ou en raison–de ses motivations basées sur la race et sur la classe sociale, la guerre aux drogues se poursuit. Son influence s’observe non seulement dans le système de justice pénale, mais également dans l’éducation, l’emploi, le logement, les médias, la médecine et les familles. Ses impacts sont dévastateurs. La guerre aux drogues a déstabilisé des nations entières, coûté des billions de dollars en répression, emporté d’innombrables vies, alimenté le crime organisé – et pourtant, le commerce illégal de drogues demeure l’activité illicite la plus lucrative au monde.15 Il n’est pas rare d’entendre que « les drogues ont remporté la guerre aux drogues ». Et les grands perdants de cette guerre, ceux qui en font les frais, sont les individus les plus marginalisés de la société.


    Sources citées

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    28. N.D. Boyd, S. C. “History of Drug Policy in Canada.” Excerpt from: Busted: An Illustrated History of Drug Prohibition in Canada. 2017. Fernwood Publishing. Blog. Canadian Drug Policy Coalition. URL:  https://drugpolicy.ca/about/history/
    29. N.D. Drug Policy Alliance. “A Brief History of the War on Drugs.” URL: https://drugpolicy.org/issues/brief-history-drug-war
  • Imagine safer supply: envisioning an ideal safe supply program, from available substances to the staff and setting

    Imagine safer supply: envisioning an ideal safe supply program, from available substances to the staff and setting

    I never made it to college or university. As a matter of fact, I never even completed high school. So the idea that I could one day be a skilled and experienced mixed-methods researcher, get paid for my knowledge and respected when I spoke, and co-author published papers and articles far exceeded my modest dreams. I had participated in research in the past as an interviewee—giving my perspective on a variety of subjects—but never from the investigative side. As you can imagine, when I was offered the opportunity to train and work as a qualitative researcher I was thrilled and jumped at the chance, particularly as the subject was one I was personally and professionally invested in: safe(r) supply.

    “This project laid a path for me. Now all I have to do is walk it!”

    ~ Phoenix Beck McGreevy

    Organizer on a microphone at safe supply rally

    Imagine Safer Supply is a massive undertaking—a multi-provincial qualitative research project seeking to explore the attitudes and perceptions people have about safer supply. We spoke to both people who identify as substance users and people who were primarily involved in frontline service provision to drug users. We found that there is less of a hard line dividing these two groups than we had expected.

    I started with the project as a member of the Community Advisory Committee (CAC) in the summer of 2020. The team consists of the principal investigators, research associate, research assistants, and our community advisory team—the group with which I did most of my work on the project. Our committee had members with lived and living experience of drug use and/or the provision of frontline services for people who use drugs, as these were the two groups upon which our qualitative research was focused. Amongst our team, we found a similar level of crossover between the user/service provider camps as we did among the participants.

    We started from a blank slate, learning each step of research: developing interview questions, ethics review, leading interviews, and finally on to data analysis and knowledge translation. Unfortunately, as a result of the COVID-19 pandemic, which was in its first year, we were unable to do any of our work in person despite being dispersed across the country from British Columbia to Quebec. The team met frequently on Zoom and co-conducted qualitative interviews by phone or Zoom.

    Safe supply rally; Vancouver; 2021

    The research itself tested my newly minted but fierce qualitative interview skills. At first, I relied heavily upon the interview guides, asking each question in order and going through the prompts dutifully. I kept an eye on the time, shepherding participants along through the questions, neglecting to probe worthwhile digressions for the sake of following the guide in front of me. As each interview progressed and I debriefed with my colleagues—accepting constructive criticism—I became more comfortable with the art of interviewing. I began to sense where the really interesting stuff was and how to tease it out of each participant.

    Our project has the word “imagine” in its title for a reason. We are asking people to envision their ideal safe supply program, from the available substances to the staff and the setting. We soon found that getting people to imagine something that doesn’t yet exist is very difficult and takes finesse to avoid influencing people’s responses. So many of the people we spoke to brought up ideas and then shot them down, saying things like, “Oh, well that would never work here because…” Many participants found their concepts limited by existing societal and governmental structures. However, we encouraged people to really dream, to imagine models of safe supply that could be possible outside prohibition or medical models, and even capitalism and criminalization. When people ventured outside the realm of what’s currently possible, that was where the really beautiful data lived.

    Protester at Vancouver safe supply rally
    Safe supply rally; Vancouver; 2021

    For some participants, the primary focus of their ideal safe supply program was about the effect it would have on their lives. People dreamed of the life they could lead without having to hustle or do crime to feel normal. For others, it was about the physical, brick-and-mortar site of such a program. They laid out plans for community centres that welcomed people who use drugs and offered a sense of belonging and kinship where they could find wellness, however that felt for them.

    We encouraged people to really dream, to imagine models of safe supply that could be possible outside prohibition or medical models, and even capitalism and criminalization. When people ventured outside the realm of what’s currently possible, that was where the really beautiful data lived.

    Once the data collection phase was completed, we began data analysis. Spirited Zoom calls ensued as we developed our code book, combing transcripts and thinking critically about what each quote meant and how to categorize it. Each of us had different skills and interests that were shaped and honed further, bringing value to our analysis. Once our code book was fully developed and captured all the rich information our participants offered, we began to analyze the data in earnest. Currently, the team is working on analysis of the themes presented within the transcripts before we move on to knowledge translation. We plan to bring the project full circle by presenting the findings to our own communities, wider harm reduction and drug policy audiences, and drug user organizing groups, to inform their work moving forward.

    On this project, I discovered a passion and aptitude for research that I didn’t know I possessed. Each new skill I learned was exciting and I burned to know more. The idea of taking things that the community knows and transmuting it into the hallowed form of “evidence” was thrilling to me. Creating data that could be used to make change and speak truth to power—I never dreamed it would be something I could do.

    This project enabled me to imagine more than just safer supply programs: it led me to imagine a place for myself in academia and a career in research. This project laid a path for me. Now all I have to do is walk it!

  • Des ressources de sensibilisation fondées sur des données probantes

    Des ressources de sensibilisation fondées sur des données probantes

    Livres

    Why Civil Resistance Works: The Strategic Logic of Nonviolent Conflict

    « Pour plus d’un siècle, entre 1900 et 2006, les campagnes de résistance non violente ont été plus de deux fois plus efficaces que les actions violentes dans la réalisation de leurs objectifs. Grâce au soutien considérable des citoyens, qui manifestent leur activisme par des protestations, des blocages, des actes de désobéissance civile et d’autres formes de résistance non violente, ces initiatives contribuent à séparer les régimes de leurs sources de puissance principales et produisent des résultats remarquables, et ce même en Iran, en Birmanie, aux Philippines et dans les territoires palestiniens. Associant des analyses statistiques à des études de cas de pays et de territoires particuliers, Erica Chenoweth et Maria J. Stephan examinent en détail les facteurs qui permettent à ces campagnes de réussir et, parfois, qui les font échouer. Elles concluent que la résistance non violente rencontre moins de barrières à la participation et à l’engagement moral et physique, et que plus de participation contribue à une meilleure résilience, à de plus grandes possibilités d’innovation tactique et à une perturbation civique. Dans une argumentation solidement documentée, les auteurs présentent une comparaison originale et systématique entre les résultats de la violence et de la non-violence au cours de différentes périodes historiques et dans des contextes géographiques différents. Ainsi, elles réfutent le mythe que la violence se produit en raison de facteurs structurels et environnementaux ou qu’elle est nécessaire pour atteindre certains objectifs politiques. Au contraire, ces auteurs révèlent que l’insurrection violente est rarement justifiée pour des raisons stratégiques ».

    Civil Resistance: What Everyone Needs to Know

    « Un aperçu complet des mouvements de résistance civile dans le monde expliquant ce qu’ils sont, comment ils fonctionnent, pourquoi ils sont souvent efficaces et pourquoi ils peuvent échouer. La résistance civile est une technique de conflit où des citoyens non armés emploient diverses méthodes coordonnées (grèves, protestations, manifestations, boycotts, et bien d’autres tactiques) pour poursuivre un conflit sans blesser ou menacer un adversaire directement. Cette méthode a été une forme centrale de résistance dans les révolutions de 1989 et dans le Printemps arabe, et on la voit maintenant appliquée à grande échelle dans l’Amérique de Trump. Dans le livre “Civil Resistance : What Everyone Needs to Know”, Erica Chenoweth — l’une des principales spécialistes mondiales du sujet — décrit ce qu’est la résistance civile, son fonctionnement, les raisons pour lesquelles elle échoue parfois, comment la violence et la répression l’affectent, ainsi que les impacts à long terme de cette résistance. »

    Articles et études

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    Vidéos

  • I’ve been to rehab four times and I may never stay sober. I’m still recovering.

    I’ve been to rehab four times and I may never stay sober. I’m still recovering.

    It’s simple, hun—you have the disease.” Bill says this as he hands me a wooden chip inscribed with the serenity prayer:

    “God, grant me the serenity to accept the things I cannot change, the courage to change the things I can, and the wisdom to know the difference.”

    An biker who somehow landed in Westbank, Kelowna, Tom is paternal. I’ve never been told that I have a disease, but his words incite relief. I cannot stop drinking, and illness is better than badness. I have done horrible things.

    I accept a tattered copy of the Big Book and devour it, highlighting, underlining, and earmarking earnestly until I have it memorized. I meet others who do the same. We form unexpected kinships, our lives irrevocably intertwined through a singular, obstinate pursuit of wellness. I repent. They hold me. I have never felt such intimacy.

    When I leave 28 days later, we promise to stay in touch. I never speak to them again.

    I am 18 years old.

    I have been sober for 45 days, and something is very wrong. My legs have stopped working, and when I try to articulate how physically enervated I am—how utterly incapacitated—my councillors tell me to pray.

    “God, grant me the serenity to accept the things I cannot change, the courage to change the things I can, and the wisdom to know the difference.”

    I am drowning in a vast, violent emptiness. Anhedonia. Near-catatonia. The obsessions, the compulsions, the counting, the rituals; these I must relinquish to a Higher Power (though without them, I’m not sure who I am).

    “Stop thinking so much.”

    “You need humility.”

    I eat 1175 calories a day—no more, no less. Identical meals at breakfast, lunch, and dinner. To deviate would trigger a binge. Pleasure is not safe. I attend group sessions and while other women weep, I try to stay awake.

    Am I a sociopath?

    All I want is chocolate.

    I am 19 years old.

    I arrive with a black eye and hematoma on my chin. It obscures my jawline and deforms my cheekbones, my reflection as grotesque as the memories I suppress. I don’t know how it (I) got there.

    “Third time’s the charm.”

    I am too tired to have hope. After nearly three years of homelessness, I am also too tired not to. Alcohol and bulimia have been replaced by crack cocaine. I no longer feel human. The things I did at 18 pale by way of comparison.

    “Your brain is broken.”

    I am hostile. My mind is a rabid animal, and I don’t trust this place—these people—to tame it. One month becomes two. Two becomes three, then six, then seven. Something shifts. I listen in a way I never have before. I believe in a way I never have before. The obsessions, rituals, counting, compulsions; they haven’t left, but they have transmogrified into something like spirituality.

    “I could drink.”

    I stop what I am doing.

    Fall to my knees.

    Pray.

    “God, grant me the serenity to accept the things I cannot change, the courage to change the things I can, and the wisdom to know the difference.”

    Once. Twice. Three times.

    Six if the thought returns. Nine times. Twelve. Fifteen.

    I am terrified of myself.

    “Every moment you spend in treatment, your disease is outside doing push-ups in the parking lot. It gets stronger as you do. It will never go away.”

    In my sixth month I enrol in two university courses. One of them is introductory sociology. I am intrigued.

    The councillors become trusted confidantes. They convince me I can leave. They expect to see me regularly.

    I move into a basement apartment two blocks away. I visit the councillors every day, sometimes once, sometimes twice or more. I relay my academic successes.

    “Don’t let it go to your head. Recovery must come first.”

    I am 22 years old.

    “Fuck you!”

    The voice is not my own. A new woman has just arrived, and she is detoxing—hard. I am five months sober, and I have entered treatment voluntarily. I may return to my PhD, but I know I’m not prepared. I was promised that staff were trauma-informed.

    That was bullshit.

    Publicly funded, there are two councillors for thirty patients. Most have been street-entrenched for years or decades. We are told not to discuss drug use. Or violence. Or sex work. Or poverty.

    “If you get triggered, we don’t have the tools to contain you.”

    Twelve-step meetings are optional. AA members come bi-weekly to share their experience, strength, and hope. When they do, I look away.

    “God, grant me the serenity.”

    I walk past the door, my fists clenched tightly. Bile rises in my throat.

    I see myself in them. I will see myself in them when a month, two months, a year, from now they use again. They will hate themselves. It will not be their fault.

    “This place is a joke!”

    This time the voice is mine. I am with the psychiatrist. I denigrate her profession.

    “I do not consent to being pathologized.”

    She raises her eyebrows; takes notes; says nothing.

    I leave early. In addition to bipolar disorder, obsessive compulsive disorder, borderline personality disorder, possible dissociative identity disorder, complex post-traumatic-stress disorder, somatoform pain disorder, possible autism, and, of course, severe alcohol and stimulant use disorders, my discharge summary notes that I present as rather angry.

    I am 30 years old.

    As I write this, I am 31 years old. I have been abstinent from alcohol and illicit drugs for nearly two years. Before my last relapse, I had been abstinent for eleven months. Prior to that (and prior to the two-year bender that was my Masters’ degree), I hadn’t touched drugs or alcohol for well over five years.

    My adult life has been shaped by substance use (or lack thereof): freneticism during periods of active use; temporal boundaries demarcated by surges of euphoria and devastating loss; rigidity and suffocation while sober; crystalline awareness that despite my Herculean efforts to think, look, and act normal, the best I’ll do is pass.

    Panic, regardless. I fully expect to use again. Perhaps not immediately but eventually, definitely.

    I am still recovering.

    Only now, I don’t say that I’m recovering from addiction. Alcohol and drug use were never the problems. In a society that was built on oppression, though (that is, in a society that wouldn’t exist without the ongoing displacement, dispossession, and disappearance of Indigenous peoples; that has been designed to control, regulate, and disadvantage Black communities; that approaches disability as a fatal character flaw; that produces enormous wealth disparities and prohibits anyone who can’t or won’t conform to White, cis-hetero patriarchal standards of productivity from access to power or resources), alcohol and drugs are convenient red herrings.

    I am still recovering.

    Rather than focus on recovering from a “hopeless state of mind and body,” however, I have turned my efforts outward.

    For someone who once espoused the merits of sobriety (and who viewed sobriety as the pinnacle of addict achievement), to now be unbothered by the idea of substance use (mine and anyone else’s) is a radical departure.

    How did I get here?

    During my third round of addiction treatment, I found sociology. I had very few expectations, but “the systematic study of society” seemed interesting, and it also fit my schedule. I still lived in extended care at treatment centre three, so I took the bus to campus between morning check-in, individual and group therapy sessions, and my daily chore routine. I wrote my first essays in the communal kitchen I shared with 120 other patients, and I asked staff to proofread my work because I didn’t own a computer (not that I would have been permitted to use one even if I had).

    At first, education was jarring. After four years immersed in twelve-step programs, to be introduced to the social determinants of health (that is, the socio-cultural, economic, and political conditions that positively or negatively influence one’s health status) was de-stabilizing. Specifically, the insight that exclusion on the bases of income, race, sex, gender, and disability, among other facets of one’s identity, is correlated with outcomes such as substance use confounded me. I had been taught that addiction was solely my responsibility. It was the product of a malignant mind, nothing more, and so extraneous conditions such as homelessness were consequences of one’s usage, not causes.

    The more I reflected, however, the more sociology made sense. I developed an “awareness of the relationship between personal experience and the wider society,”1 and was able to understand patterned behavior responses among social groups as they pertained to rates of addiction.

    Indigenous peoples, for example, report much higher rates of alcohol and illicit drug addiction than other ethnic groups. Why? Because White frontiersmen introduced alcohol as a tool of colonization. Not only was it a profitable trade good, but authorities knew it would distract from the violence they enacted.3 The attempted genocide that followed included confining Indigenous peoples to reserves, apprehending and abusing generations of children through the residential school system and, in Canada, the “60’s Scoop,” prohibiting cultural engagement, non-consensual medical experimentation, and legislation that continues to disproportionately inflate Indigenous rates of poverty, homelessness, unemployment, and murder. Furthermore, mainstream addiction treatment approaches substance use through a Western world-view, erasing traditional knowledge systems and perpetuating colonial disruption.

    Is it any wonder, then, that Indigenous people are more “prone” to substance use?

    This is not to say that personal stories aren’t unique, or that individual trajectories won’t be informed by multiple, intersecting forces throughout the life course. We can’t accurately predict behavioural outcomes based on one or two bits of demographic information, but we can (we must) analyze trends (addiction-related and otherwise) within their historical contexts.

    Initially, I was fascinated by this information but didn’t think that it applied to me. I was raised in a wealthy suburb. I’m White. I had been sexually harassed, sure (and raped multiple times while homeless), but every AA sponsor I’d had told me this was further evidence of my powerlessness over substance use. “We put ourselves in vulnerable positions while using—when you stay sober, you’ll stop being taken advantage of.” My life chances hadn’t been constrained by systemic oppression (other than ableism, but I did not yet identify as neurodivergent), just my own bad choices, so I remained convinced that while addiction is beyond some, less privileged, people’s control, the origins of my own usage still lay firmly within me.

    Then I learned about trauma. My professors introduced me to the implications of interpersonal trauma, and they demonstrated that prolonged developmental trauma, regardless of perceived severity, fundamentally alters one’s nervous system.2 I won’t disclose intimate details of my childhood, but I will say that one needn’t be raised in poverty or contend with racism to regularly feel afraid. This can have enormous physiological consequences in childhood, as being in “fight or flight” mode can lead to mood disturbances4, emotional dysregulation5, and loss of connection6—all potential roots of addiction.

    Over time, it became evident that personal traumas are inextricable from broader (“macro-level”) structures such as the economic system. Our “micro-level” communication is shaped by the norms and expectations of society, so values such as individualism, a product of capitalism, invariably affect our actions. AA itself is hyper-individualized: It treats addiction as a “spiritual malady,” and in so doing it mars one’s ability to interrogate how social inequalities (and the maladaptation they evoke) make substance use desirable—and sometimes very necessary.

    With this, I questioned everything.

    “What if I had been raised differently because my parents had been raised differently? If my Grandparents hadn’t been impoverished immigrants, would we all have been a bit more inclined toward tenderness? Would I still have developed an eating disorder?”

    “What if I developed an eating disorder, but the response to it had been less informed by a lineage of poverty? Rather than see bulimia as indulgent, would my parents have had the skills to inquire about the feelings underneath? Would I still have started drinking?”

    What if, when I started drinking, I hadn’t been sent to addiction treatment that taught me that sickness was innate? Would I still have blamed myself for all that had happened, prompting an endless cycle of institutionalization, homelessness, self-flagellation via health-negating behaviours, subsequent institutionalization, and even fiercer destruction each time it didn’t have the desired result?

    On and on and on. But, most importantly:

    “Wait. Why is high-intensity alcohol and illicit drug even considered bad in the first place?”

    I specialized in the medicalization of deviance (“abnormality”) as a mechanism of social control.7 In so doing, I catapulted head-first into a voyage of unlearning everything I knew about addiction. I was enabled in part by research, yes, but mostly grew from a) leaving AA and figuring out who the hell I was beneath the meetings and the chanting; and b) connecting with drug user activists. They, more-so than any text, instilled in me that the war on drugs, not drugs themselves, is a threat to our survival.

    The history of alcohol and drug prohibition has been thoroughly documented elsewhere, so I needn’t repeat it here. Suffice to say that some substances are illegal not due to their chemical properties, but because they used to afford racialized immigrants and descendants of slavery economic and festive alternatives to wage labour. This threatened colonial nation-building projects, so state officials criminalized anything that might undermine their access to a compliant, exploitable workforce. Substance use also triggered fears of racial mixing (a major no-no among White European settlers obsessed with racial purity), and it threatened Victorian-era morality because ultimately, getting high feels really fucking good.

    Today, the “disease model of addiction” has been naturalized in common discourse. That frequent, high-intensity substance use is a “chronic, relapsing condition” is a taken-for-granted assumption, with few publicly questioning why so many of us get and stay afflicted.

    But, when we closely examine the most damaging outcomes of addiction—unemployment, incarceration, lack of access to medical treatment, homelessness, fatal overdose, suicide—we see that most are derived from the stigma, discrimination, and legislation surrounding use, not the actual act of using.

    If, for example, heroin were to be publicly available, regulated, and normalized, people wouldn’t have to use in secret. They would know exactly what and how much they were getting instead of being poisoned by a toxic drug supply, and this would substantially reduce one’s risk of overdose. Beyond this, not getting fired or acquiring a criminal record by using would enhance employment options, and homelessness due to “unemployability” would thus be less prevalent.

    Additionally, sustained illicit use necessarily propels one into a nefarious shadow world, one in which using becomes priority and social norms are suspended in favour of acquiring one’s next fix. How much of deviance is the result of not caring to participate in society, and how much is learning to not care after being treated like a degenerate? We internalize the labels ascribed to us, and we begin to act accordingly.

    So where does this leave me?

    Blue banner featuring an image of the book The Becoming by Nicole Luongo

    Ultimately, I have come to see my own alcohol and crack-fueled binges, which now happen roughly once every 12 – 18 months, as the culmination of economic, political, legislative, institutional, and inter-personal failures. When I have tried to prevent benders by seeking help for post-traumatic stress (and the terrifying dissociative and somatic symptoms that accompany it), my first option is a sterile psychiatric ward, where I exist behind locked doors, am medicated beyond recognition, and am released with an appointment slip reminding me that a month later I am to meet with a harried psychiatrist who will review my medical records, tell me to consider permanent institutionalization, and prescribe me sufficient doses of antipsychotic and mood-stabilizing drugs to kill myself should I opt to (which I always seriously consider).

    Mid-bender, trying to seek support looks like presenting at an emergency room, waiting for hours while hallucinating or in severe withdrawal, being given hefty doses of diazapam with the instruction not to ingest while drinking (ha!), and continuing to use. My roommates don’t know how to cope, I invariably lose my housing and employment, and those I should be able to call for help have been told by well-intentioned but misguided acquaintances that offering shelter, food, and safety is “enabling” my addiction (for the record, it is not).

    I am left to fend for myself, and after four or so weeks of this I am so depleted and ashamed that I crawl into detox (after a bed becomes available, which can easily take weeks). Afterward, I’m still broke, alienated, and I have nowhere to go.

    When I went to addiction treatment for the final time, I thought that perhaps my experience would be different. I was going of my own volition, I hadn’t just been scraped off the street, and I was optimistic that I might receive the trauma care that I still desperately need. Instead, I watched horrifically abused women be blamed for their condition, and as I felt myself deteriorate, I got the hell out of dodge.

    I am not broken. The system is.

    In some ways, medical sociology ruined me. I can no longer cope with the cognitive dissonance of sitting in twelve-step meetings while people discuss their “selfishness” and “self-centeredness” (the true etiology of addiction, according to the Big Book) while all I see are oppression and bad policy. I’ve tried many times over the years, and each meeting I attend reinforces that these are not, nor have they ever been, my people.

    I also no longer pray to accept the thing I cannot change. I work (even as I oft question whether doing so is useful) to change that which I cannot—will not—accept. The former was easier, but given what I know, being passive in the face of injustice is not a viable option

    I am still recovering.

    By working with other user-activists on drug policy reform, I am recovering from loneliness and despair.

    By supporting a homeless encampment, I am recovering from isolation and political impotence.

    By writing, I am recovering from years of capitalist-induced performativity and my realities being denied.

    According to AA, I am delusional. I most certainly will die soon. To this I say, maybe, but at least I’ll have died not hating myself.

    I also refuse to invite people into my life whose love for me is conditional, so when (not if—when) I use again, I will not be alone. This fills me with great comfort, and it is now more important than a sobriety date ever was.

    I dare call it spirituality.


    Notes

    Please note that I’m not claiming that trauma is the sole cause of addiction, which would be as reductive and deterministic as the program I malign. I broadly define trauma as structural violence, symbolic violence, and the more obvious interpersonal troubles it induces. With a background in medical sociology, I have been trained to minimize biological contributions to addiction; but severe, sustained use (which is more prevalent in marginalized groups), leads to physiological adaptations that make reducing or stopping one’s use more difficult.

    I fully believe that some people (most people, actually) can transition away from problematic use and learn to use moderately. I am not one of those people.

    I don’t wish to dispute that sustained substance use can have deleterious mental and physical health outcomes. As someone who narrowly evades death semi-regularly, it absolutely can. Still, I maintain that this is mostly a result of policy and stigma.

    References

    1. Mills, C. W. (1961). The sociological imagination. New York, NY: Grove Press
    2. 2. van der Kolk, B. A. (2014). The Body Keeps the Score: Brain, Mind, and Body in the Healing of Trauma. (pp. 99)New York, NY: US: Viking
    3. Frank, J. W., Moore, R. S., & Ames, G. M. (2000). Historical and cultural roots of drinking problems among American Indians. American Journal of Public Health, 90(3), 344–351.
    4. Lanius, R., & Olff, M. (2017). The neurobiology of PTSD. European Journal of Psychotraumatology, 8(1), 1314165
    5. Hopper, J. W., Frewen, P. A., Kolk, B. A. V. D., & Lanius, R. A. (2007). Neural correlates of reexperiencing avoidance, and dissociation in PTSD: Symptom dimension and emotion dysregulation in response to script-driven trauma imagery. Journal of Traumatic Stress, 20(5), 713 — 725. doi: 10.1002/jts.20284
    6. Sherin, J. E., & Nemeroff, C. B. (2011). Post-traumatic stress disorder: The neurobiological impact of psychological trauma. Dialogues in Clinical Neuroscience, 13(3), 263 — 278.
    7. Conrad, P. (1992). Medicalization and social control. Annual Review of Sociology, 18(1), 209–232. doi: 10.1146/annurev.so.18.080192.00123
  • Moms Stop the Harm and Lethbridge Overdose Prevention Society Launch Legal Action Against Alberta Government

    Moms Stop the Harm and Lethbridge Overdose Prevention Society Launch Legal Action Against Alberta Government

    supervised consumption service lawsuit in Alberta supervised consumption service lawsuit in Alberta

    The Government of Alberta is threatening the health and safety of people who use drugs by rolling back reforms introduced by the federal Liberals in 2017 and imposing additional barriers to accessing supervised consumption services. The Liberal reforms in 2017 made it easier to set up harm reduction services in the province. The Government of Alberta has now introduced onerous requirements to service providers and service users that will make it more difficult to access and provide life-saving care.

    These requirements include the following:

    • Providing a name and personal identifying information to access service
    • Good Neighbourhood agreements that far exceed current consultation requirements that make it virtually impossible to open any new harm reduction sites or renew existing ones
    • Standards for staff qualification and training that will exclude many people with lived and living experience
    • Onerous reporting requirements that are impossible for grassroots organizations, often operating out of a tent, to operate
    • High fines for non-compliance that will bankrupt small agencies

    In response, Moms Stop the Harm and the Lethbridge Overdose Prevention Society (LOPS) have commenced legal action against the Government of Alberta to ensure that no additional barriers to access and provision of life-saving supervised consumption services are introduced.

    “We know that our children would not have died had their overdoses taken place at a consumption site. This option was not available to them at the time. We also know how stigma and shame made them hide their use. We strongly oppose the new provincial guidelines as they will create barriers that will keep people from life-saving services. We know how hard it is to grieve someone you love and every overdose reversed is a family that does not need to arrange a funeral. This is why we launched this lawsuit together with LOPS—to save lives and to give people hope for the future.”

    Kym Porter and Petra Schulz, Moms Stop the Harm

    Both organizations argue that these changes—introduced in “Guidelines” by the Government of Alberta—conflict with the federal government’s goal of improving access to harm reduction services in 2017. They also allege that the Guidelines breach sections 2(a), 2(b), 7, 8, 12, and 15 of the Charter of Rights and Freedoms.

  • Nous sommes en deuil avec les communautés des 215 enfants

    Nous sommes en deuil avec les communautés des 215 enfants

    Cette dernière semaine, l’histoire sombre du passé colonial du Canada a été crûment exposée : 215 corps d’enfants ont été découverts sur le terrain d’un ancien pensionnat à Kamloops, en Colombie-Britannique, sur le territoire des peuples Tk’emlúps te Secwépemc. Ces atrocités ont même retenu l’attention de médias internationaux et les drapeaux d’édifices gouvernementaux ont été mis en berne pour marquer la tragique découverte.

    Nous faisons une pause dans notre travail pour les politiques canadiennes sur les drogues afin de nous rappeler une fois de plus que nos politiques actuelles en la matière ont des racines coloniales et racistes et que notre travail à venir nécessite que nous nous tenions aux côtés des peuples autochtones et que nous les soutenions, afin de travailler ensemble à créer des politiques qui mettent fin à la discrimination, à l’oppression et aux autres conséquences dévastatrices que vivent tant de personnes autochtones.

    La découverte de ces tombes non marquées montre clairement ce que les Canadien-nes doivent reconnaître : le Canada a été fondé sur la base de systèmes coloniaux et racistes, il fonctionne encore ainsi et cela continue de causer des préjudices considérables aux communautés autochtones. Ne vous y trompez pas, il s’agit d’un génocide. Voici ce que le grand chef Stewart Philips, de l’Union des chefs autochtones de la Colombie-Britannique, a déclaré aux médias :

    « Voici la réalité du génocide que l’État colonial a infligé, et continue d’infliger, aux peuples autochtones. Aujourd’hui, nous rendons hommage à la vie de ces enfants et nous prions pour qu’eux, elles et leurs familles puissent enfin trouver la paix. »

    Le souvenir de cette horreur et l’engagement en faveur de la réconciliation ne doivent pas s’estomper avec le temps. Les gouvernements doivent s’engager pleinement à l’égard de la justice et de l’autodétermination des communautés autochtones.

    En tant que coalition engagée à transformer les politiques canadiennes sur les drogues afin qu’elles soutiennent et habilitent les peuples autochtones, nous nous engageons à travailler avec les organismes autochtones pour démanteler un cadre de politiques sur les drogues qui a fait tant de ravages.

    En ce moment, nous vous encourageons à vous rapprocher des organismes autochtones qui œuvrent à la transformation et qui soutiennent les survivant-es des pensionnats; et vous demandons d’envisager de faire un don à l’Indian Residential School Survivor Society, un organisme qui offre du soutien à ces survivant-es depuis plus de 20 ans, en Colombie-Britannique.

    Teddy bears and childrens shoes lining the steps of the BC Legislature
    Memorial outside BC Legislature; Victoria; 2021

    En plus d’exprimer notre soutien et notre indignation dans les médias sociaux, nous pouvons écrire à nos député-es au fédéral et montrer notre engagement en appuyant les organismes dirigés par des Autochtones qui sont les mieux placés pour apporter la guérison en cette période traumatisante.

    Veillons à ce que ceci ne soit pas qu’un flash éphémère qui s’estompe avec la prochaine « grosse nouvelle », et engageons-nous encore davantage à avoir des conversations difficiles avec nos ami-es et nos familles sur ce que signifie une véritable recherche de réconciliation. Le silence et l’apathie doivent cesser dès maintenant, alors que nous nous dirigeons vers la justice et la réconciliation avec les communautés autochtones du Canada.

  • Cycle to Stop the Harm, une campagne qui vise à lutter contre les dommages. Un voyage à travers le Canada en faveur d’une politique sur les drogues progressiste.

    Cycle to Stop the Harm, une campagne qui vise à lutter contre les dommages. Un voyage à travers le Canada en faveur d’une politique sur les drogues progressiste.

    Le 1er janvier 2021, j’ai embarqué sur mon vélo et roulé de Saskatoon à Vancouver pour réaliser un projet de sensibilisation à la crise de l’empoisonnement aux opioïdes, à la réforme des politiques en matière de drogues et à la santé mentale, un projet appelé « Cycle To Stop The Harm ». J’ai également recueilli des fonds pour les organisations « Moms Stop The Harm » et la Coalition canadienne des politiques sur les drogues, deux groupes extraordinaires qui travaillent à la réforme des politiques sur les drogues, à la sensibilisation et à l’éducation. Déterminé, je me suis lancé avec un objectif de collecte de fonds de 20 000 $ et avec un vélo rempli de tout ce dont j’avais besoin pour survivre en faisant du camping d’hiver et du vélo à partir des prairies canadiennes, en passant par les montagnes, jusqu’à la côte ouest. Après 29 jours et environ 1 670 kilomètres, j’ai réussi à arriver à Vancouver avec tous mes orteils et tous mes doigts, le 29 janvier 2021, ainsi qu’un total de 25 450 $ de fonds recueillis. Avant tout, cela a permis de donner une voix à des dizaines de milliers de personnes qui sont autrement ignorées, et de sensibiliser à l’épidémie d’opioïdes actuelle.

    Iliajah Pidskalny making a peace sign in front of his bike
    Iliajah Pidskalny; Saskatchewan; 2021

    Au cours de ce mois-là, j’ai reçu de nombreuses questions : pourquoi le vélo ? Pourquoi l’hiver ? Pourquoi pendant une pandémie ? Mais qu’est-ce que tu as mangé ? Pourquoi du beurre d’arachide ? Qu’est-ce qui t’a motivé lorsque c’était vraiment difficile ? Comment t’es-tu entraîné pour cela ? Que feras-tu après ? As-tu un intérêt personnel pour ce problème ? Et enfin, la question la plus fréquente et la plus importante : de quels dommages parles-tu ?

    La réponse simple à ce dernier point concerne les dommages causés par nos politiques actuelles en matière de drogues, qui reposent sur un modèle qui a échoué depuis des décennies. La « guerre contre la drogue » est un terme utile, car il souligne l’agressivité de notre approche actuelle qui, comme la guerre, coûte beaucoup d’argent et de nombreuses vies. Après des décennies de ratage, un tel modèle est en contradiction avec les preuves, la logique et les droits de la personne. La crise des opioïdes est un exemple concret des dommages causés par la guerre contre la drogue. Cette crise représente une grave épidémie qui coûte la vie à des milliers de personnes.As-tu un

    Intérêt personnel pour ce problème ?

    Non, je n’ai pas de liens personnels avec une surdose ni avec l’empoisonnement par le fentanyl. Toutefois, je suis humain, et j’ai donc un lien personnel avec les autres humains. Je trouve que cette « guerre contre la drogue » est pitoyable et dévastatrice, et que les politiques dans ce domaine sont illogiques et injustes. Ces politiques ont été justifiées par un manque d’éducation sur les drogues, sur la consommation de drogues et sur la santé mentale, ce qui a créé une culture marquée par la stigmatisation et une marginalisation tolérée. Le Canada devrait prendre ce problème plus au sérieux avant que chaque Canadien ne perde un être cher à cause d’un empoisonnement par le fentanyl ou d’une surdose. Ce n’est pas « nous contre eux ». En adoptant une approche des politiques sur les drogues qui est plus empathique et qui respecte les droits de la personne, on mettra non seulement en lumière les inégalités systémiques, qu’elles soient socio-économiques, culturelles, raciales ou sexuelles, mais on pourra aussi mieux comprendre la santé mentale.

    Donc, quand on me demande, « de quels dommages parles-tu ? »

    Je parlais en fait des dommages causés par nos propres pensées. Que nous ayons perdu un proche ou que nous soyons prédisposés génétiquement à la dépression, notre esprit est à l’origine de tant de souffrances. « Cycle To Stop The Harm » était axé sur la santé mentale. Une réforme de la politique en matière de drogues est le meilleur moyen de renforcer la recherche, la compréhension et la compassion concernant la santé mentale et de réduire la stigmatisation (ainsi que de sauver la vie de dizaines de milliers de personnes). Nous sommes tous à risque de souffrir de troubles psychologiques, qu’il s’agisse de dépression, de sentiment de solitude, d’anxiété, de dépendance, d’avidité, de haine ou de jalousie. Ce sont les raisons principales pour lesquelles je me suis lancé dans la campagne « Cycle To Stop The Harm ». C’est pourquoi j’étais si motivé pour attirer l’attention sur ce problème, même si je risquais de souffrir d’hypothermie et d’engelures pendant 29 jours. Je pédalais pour tous les garçons et toutes les filles qui ont été empoisonnés par le fentanyl et pour toutes les mères et tous les pères qui souffrent maintenant de leurs pertes. Je roulais pour les communautés les plus pauvres du Canada, du Ghana, du Mexique et de tous les autres pays. Je pédalais pour les riches et les pauvres, les religieux et les athées, les jeunes et les vieux. Chaque jour sur cette bicyclette, je roulais pour chaque être humain.

    Pourquoi le vélo?

    Je savais que je pourrais faire du vélo et faire du camping en hiver. Je savais qu’un voyage fou comme celui-ci attirerait de l’attention. Je savais que je pourrais donner une voix à tant de personnes qui n’ont ni la possibilité ni les ressources pour s’exprimer (ou pour être entendues).

    Cold snowing Saskatchewan highway
    Highway in Saskatchewan; 2021 / Autoroute en Saskatchewan ; 2021

    Pourquoi en hiver?

    J’ai eu l’idée mi-décembre et je ne voulais pas attendre. On m’a dit que j’étais impatient, mais je dirais que je suis plutôt passionné. Je savais aussi que cette initiative gagnerait beaucoup plus d’attention en hiver qu’en été. De plus, voyager à vélo et faire du camping en hiver mettent en lumière certaines difficultés rencontrées par les Canadiens sans-abri. Ayant été témoin de l’itinérance lors d’un autre voyage hivernal à vélo de six semaines dans l’est du Canada (du 23 octobre au 3 décembre 2020), je voulais inciter les gens à réfléchir aux défis liés à l’itinérance. Je me suis souvent demandé pourquoi on me trouvait aventureux ou courageux, tandis qu’on disait rarement une chose pareille (ou rien du tout) aux personnes qui vivent dans la rue. C’est dur de vivre dehors en hiver, même si on est bien équipé et que c’est volontaire. Je ne peux pas imaginer comment c’est difficile de le faire involontairement et de devoir faire face à d’autres obstacles tels qu’une maladie mentale grave ou la stigmatisation.

    Pourquoi pendant une pandémie?

    Le monde entier se trouve aux prises avec une pandémie sans précédent, et pourtant, les problèmes de logement, de dépendance, de dépression, de suicide et d’autres troubles de la santé mentale et inégalités sociales ne cessent jamais. Au contraire, les surdoses et les suicides ont même augmenté dans de nombreuses communautés pendant ce temps. Je n’allais pas attendre que la pandémie soit « terminée » pour agir face à ces problèmes. J’ai suivi tous les protocoles sanitaires et accepté les défis particuliers que cela impliquait, comme vivre pendant deux semaines dans une tente, après de longues journées à vélo, jusqu’à ce que l’on puisse m’accueillir dans une maison. Cela m’a permis d’avoir accès à deux maisons chaleureuses au cours du mois de janvier, mais pas assez de douches…

    Quant au voyage même, je vais essayer de décrire en quelques mots les difficultés rencontrées.

    Grâce à mon bon équipement, je n’ai jamais eu froid pendant la nuit. Par contre, chaque matin, il a fallu que je sorte de mon sac de couchage bien chaud pour mettre des chaussettes, des bottes et des mitaines qui étaient gelées. Au cours de la nuit, mon souffle se transformait en neige sur les murs intérieurs de ma tente. Ainsi, si je bougeais brusquement, la neige tombait dans ma tente. J’avais des chaussettes sèches en réserve, mais mes bottes étaient mouillées (gelées), alors je les ai gardées en cas d’urgence (ce qui n’est jamais arrivé, heureusement). Jour après jour, tout devenait de plus en plus mouillé et gelé.

    Tent covered in snow along Cycle to Stop Harm route | Iliajah Pidskalny cycle
    Camping along Cycle to Stop Harm Route; 2021 / Faire du camping le long de la route de « Cycle to Stop the Harm » ; 2021

    Une fois que j’avais mis mes chaussettes et mes mitaines gelées, je rangeais le camp dans l’obscurité afin de pouvoir pédaler à l’aube. Comme la lumière du jour était limitée (surtout au début), je pédalais de l’aube au crépuscule. Il m’a fallu beaucoup de temps et d’énergie pour préparer et ranger chaque jour un camp d’hiver efficace. Afin que cela vaille la peine, il me fallait faire au moins 80 km de vélo par jour. Cette distance n’était pas facile à parcourir contre les vents contraires qui soufflent dans les prairies (toujours 50 km/h et parfois jusqu’à 90 km/h en rafales), mais j’ai pu parcourir une moyenne de 120 km par jour lorsque j’étais dans les montagnes.

    Une fois le camp rangé et le vélo prêt à partir, l’une des parties les plus difficiles était d’enlever des couches de vêtements avant de pédaler. Ça a toujours été dur. Je chantais et parlais comme un fou et cela semblait m’aider. Ensuite, il ne restait qu’à pédaler jusqu’à ce que mon corps produise assez de chaleur pour que mes frissons cessent. Mais, avant ces moments-là, le froid glacial semblait épuiser mon énergie physique et mentale… jour après jour. Une fois complètement réchauffé, j’ai pédalé avec seulement une chemise à manches longues, des leggings en polyester et un maillot de bain. Puis, la prochaine partie la plus difficile : m’arrêter pour faire une pause. Si je m’arrêtais, j’avais très froid, je frissonnais et je claquais des dents en quelques minutes (ou parfois quelques secondes). Être au beau milieu de nulle part au Canada avec de tels frissons conduit rapidement à l’hypothermie. Ma seule source de chaleur était celle de mon corps en faisant de l’exercice. Je m’arrêtais donc rarement et seulement quelques instants. Une petite gorgée d’eau (qui devait être gardée dans un thermos) et une petite bouchée d’autant de calories que possible avant de reprendre le vélo. J’ai remarqué que faire du vélo avec la bouche pleine de nourriture en essayant de ne pas s’étouffer et en portant un masque en même temps était une façon de se réchauffer rapidement après une pause.

    Qu’est-ce que je mangeais?

    Chaque matin et chaque soir, je mangeais des nouilles de riz avec du beurre d’arachide. Pour me soutenir le reste de la journée, je préparais des barres énergétiques à base de dattes, de chocolat, de beurre d’arachide et de tortillas. Après avoir pédalé toute la journée, j’avais toujours un gros coup de froid lorsque j’arrêtais enfin de pédaler pour la nuit. Pour éviter cela, je montais le camp aussi vite que possible (ce qui a toujours très bien marché). Ensuite, je préparais mes nouilles de riz pour le souper, souvent avec du jus de légumes ou des tomates en conserve et, évidemment, du beurre d’arachide. J’ai mangé d’autres choses sur ma route, notamment des bonbons en Saskatchewan et des croustilles en Alberta. Mais une fois que j’ai appris que la combinaison de dattes, de chocolat, de beurre d’arachide et de tortillas me faisait sentir invincible, je n’ai jamais voulu autre chose. Et ce fut ainsi, pendant 29 jours.

    Noodles cooked in a sauce pan in a tent
    Eating a meal during Cycle to Stop the Harm; 2021 / Prendre un repas pendant le « Cycle to Stop the Harm » ; 2021

    Pourquoi le beurre d’arachide?

    Tous ceux qui avaient suivi mon voyage sur les réseaux sociaux ont remarqué que le beurre d’arachide était un thème constant. Bien qu’il ait été considéré comme une sorte de blague, ce produit constituait la majorité de mon apport calorique. Non seulement parce qu’il ne coûte pas cher, mais aussi parce que j’ai de sérieux problèmes de santé intestinale (SCI). Mes problèmes de santé m’ont presque amené à arrêter de voyager et de vivre ce genre d’aventure, mais j’ai décidé d’adapter mon mode de vie (régime alimentaire) de manière à pouvoir faire ce que j’aime le plus. Évidemment, il a fallu que je redécouvre ce qui me passionne le plus, mais ça, avec le beurre d’arachide, me permet d’aller de l’avant. (Je partage cela pour rappeler que je suis humain et qu’il ne faut pas exagérer les qualités de mon caractère.)

    Qu’est-ce qui m’a motivé dans les moments les plus difficiles?

    J’ai rencontré de nombreuses personnes tout au long de mon parcours et chacune avait une histoire, que ce soit la perte d’un ami empoisonné par le fentanyl ou sa propre histoire d’alcoolisme, de consommation d’héroïne ou d’achats compulsifs. Je me rappelais chaque jour pour quoi et pour qui je roulais : c’était pour la santé mentale de tous. Quand mes orteils étaient gelés ou que le vent soufflait en rafales à 90 km/h, je me disais : « Ce n’est pas que pour toi, Iliajah. C’est pour tout le monde ». Je regardais vers les montagnes et je me disais : « Sois patient comme les montagnes, fort comme le vent, et humble comme la poussière ».

    Pendant ce mois, j’ai rarement pensé à ma destination. Je me concentrais plutôt sur un seul jour à la fois. Faire du vélo et du camping dans le froid exige beaucoup de concentration, et il y avait peu de temps ni pour célébrer ni pour me détendre. Chaque instant était très calculé, car je devais constamment faire face à la menace de l’hypothermie et des engelures. Cependant, lorsque j’ai quitté Manning Park un matin, à une température de -20 °C, et que je suis arrivé à Agassiz à une température de +8 °C l’après-midi même, je me sentais incroyablement soulagé. C’est à ce moment-là que j’ai su que j’avais réussi mon voyage et que j’arriverais en toute sécurité à Vancouver dans quelques jours. Lorsque je suis arrivé à ma destination officielle, la Jack Poole Plaza (flamme olympique) à Vancouver, tout ce que je ressentais était une fatigue indescriptible après mon voyage et une certaine joie à l’idée de ce qui m’attendait.

    Iliajah Pidskalny in front of the Olympic Flame in Vancouver
    Iliajah Pidskalny; Vancouver; 2021

    Comment me suis-je entraîné pour cela?

    Au cours des six dernières années, je n’ai pas eu de voiture, ce qui a signifié de nombreux hivers et de nombreuses randonnées à vélo sur de longues distances. Mon premier voyage a été de Saskatoon à Vancouver (en été, à 18 ans, avec un copain), et j’ai découvert une passion pour le vélo de longue distance. Depuis ce temps, je suis allé faire de longs voyages en Indonésie, au Cambodge, en Espagne, et ailleurs au Canada. Je savais que mes jambes étaient prêtes pour « Cycle To Stop The Harm ». Toutefois, comme l’hiver est une autre affaire, je me suis concentré cette fois sur mon esprit. J’ai eu la chance d’avoir le temps, l’énergie et les ressources (livres, WiFi, contacts) qui m’ont aidé à découvrir et à pratiquer la méditation. Ce fut le point de départ de mes sentiments de compassion et d’empathie, les sentiments qui m’ont poussé à me lancer dans un voyage à vélo en plein hiver, pour personne de particulier, et pourtant pour chaque personne en particulier.

    Et après?

    Je suis allé sur l’île de Vancouver et j’ai continué à faire du vélo pour « Cycle To Stop The Harm ». Ayant terminé la collecte de fonds, j’ai décidé de me concentrer sur le dialogue et la réduction de la stigmatisation. Je croyais que ce serait un peu moins dur que mon expérience de ce dernier janvier, mais j’avais tort. J’ai connu un autre mois plein de mains et de pieds gelés, avec des frissons et des claquements de dents contre l’hypothermie. C’était beaucoup plus difficile à surmonter que le mois de janvier, car il n’y avait pas de point final. Moins de monde suivait mon trajet, et mes efforts dangereux semblaient donc inutiles. Enfin, j’ai parcouru à peu près 500 kilomètres de plus, de Nanaimo à Campbell River, puis vers le sud jusqu’à Victoria, et enfin de retour à Nanaimo. J’ai donc décidé de ralentir le projet « Cycle To Stop The Harm » et de prendre le temps de guérir et d’arrêter de faire souffrir mon corps meurtri. Pourtant, alors que les jours sont plus chauds et que le soleil brille plus longtemps, des idées bourgeonnent dans mon esprit. Un nouveau défi m’attend et il s’épanouira au bon moment.

    ~ Avec amour et enthousiasme, Iliajah Pidskalny